Isadel est une calligraphie, celle d’un vrai nom d’artiste … Un nom qui s’exprime dans un univers tout entier de langueurs, où la femme suggestive pose, en complet abandon, dans la révélation de sa complète nudité, tempête de teintes aux mystérieuses odalisques ludiques et impudiques. Peu de visages, rien que des mouvements, de la timidité à l’orgasme !
Dans cette galerie du réveil des sens, au détour du parcours des humeurs, la courbe danse et s’esquisse en véritable extraction des perceptions, telle une maternité à la plénitude des formes, et dont les tracés, rigoureux et presque tranchants, seraient tour à tour austères ou bouillonnants …
Et si l’observateur, absorbé et songeur, se délecte volontiers de la contemplation de ce jaillissement de tentations, c’est sans doute parce que le calame de l’artiste, non sans une certaine provocation des thèmes, imprime avec extase sa griffe stricte et furtive dans la trame rude et épaisse des supports …
L’inspiration se veut orthographiée dans l’éphémère contraste du sec et de l’humide. Le trait, libre et épuré, se décrit dans le ténébreux état d’un jet intermédiaire liant, dans la profondeur d’un court moment, l’environnement et la pensée.
Mais que le voyageur attentif, scrutateur et rêveur, ne s’y trompe et ne s’y précipite pas ! Car de la contemplation à l’artifice, si l’expression s’intitule avec précision, l’imagination se laisse aussi être volontiers débridée. Postures et attitudes, émois et instantanés se déclinent donc dans tous les entrelacements et entrelacs d’un instant éphémère, au gré des courants de l’encre au sillon jadis précis qui, l’inspiration insufflée, s’effiloche en veinules armoriées, telles les eaux salines de la marée descendante qui se retire sur la grande plage d’Oléron.
Fuite volontaire de la courbe dessinée, liberté déliée de la forme hiératique incarnée … où la femme repose alanguie tout autant comme une offrande qu’une allégresse, modèle de beauté, d’amitié et d’amour.
De l’obscur noir de Chine au safran doré égyptien, du brou de noix délétère au pourpre impérieux, les plages nuancées et bigarrées s’étirent de l’aurore des plans premiers jusqu’à la méridienne des décors secondaires, mélangeant perspective et introspection, méandres du bois ou générosité de la terre. L’onde colorée se décompose ainsi en champs souvent aléatoires, exprimant la timidité ou l’orgasme, symboles et conséquences de l’exubérance ou véritables instrument d’une étreinte.
En somme, défeuiller la production artistique d’Isadel, c’est à foison s’abreuver, sans détermination ou retenue, à la matière brute et à l’essence même de l’existence, et gouter avec profusion à cette « origine du monde » qui, du hasard à l’accident, tempère et écrit la vie. Toute une cosmogonie et une création artistique …
Julien Devos (Août 2011)